Mon
pauvre Drumont!
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PAR
JOSEPH
ARON
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La
Libre parole du 30 avril 1896:
"Je
me dis: Mon pauvre Drumont quant on pense que tu
pourrais être à la campagne à
écrire de beaux livres... et que te voilà
dans le tas, trottant dans le peloton!... Malgré
tout tu accomplis une besogne qui ne doit pas t'amuser
tous les jours."
Signé:
ÉDOUARD DRUMONT
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PARIS
1, rue Condorcet, 1
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MON
PAUVRE DRUMONT!...
PLÉBISCITE
SUR UN PORTRAIT
En
même temps que nous publions une petite brochure intitulée
les Mensonges de Drumont, il nous vint à
l'idée d'exposer à la devanture de notre bureau,
1, rue Condorcet, le portrait de l'auteur de La France Juive,
et de demander aux passants si son type en général
et ses traits en particulier ne dénonçaient pas
à il le moins exercé une origine sémitique.
Déjà, avant nous plusieurs personnes avaient émis
cette pensée: M. Abraham Dreyfus, le spirituel auteur
dramatique, notamment. Le portrait de M. Drumont que nous exposions
n'était pas une caricature, mais bel et bien la photographie
que La Libre Parole elle-même donne en prime moyennant
la somme de 3 fr. 50, et que nous avions acquise à ce
prix. Au dessous du portrait nous avions placé une boite
aux lettres destinée à recueillir les votes.
Notre
brochure: les Mensonges de Drumont a obtenu un
très grand succès; elle avait été
motivée par les calomnies du cynique pamphlétaire
contre l'honnête Michel Goudchaux, deux fois ministre
des finances en 1848, l'ami intime du général
et de toute la famille Cavaignac. Personne parmi les héritiers
de Goudchaux ni parmi ses parents (bien que l'un d'entre eux
se fût recommandé de cette parenté pour
se faire porter en Seine-et-Oise candidat au Sénat) n'avait
réfuté les infamies du faux aryen au sujet de
ce grand honnête homme de la noble pléiade de 1848:
nous primes sur nous de relever le gant, et le succès
a dépassé notre attente.
Quant
à notre plébiscite, nous avouons que nous ne l'avions
ouvert que pour notre satisfaction personnelle: il pouvait n'être
que plaisant, mais il n'aurait, en tous cas, jamais pu être
aussi grotesque que celui qu'ouvrit naguère La Libre
Parole en faveur du Prince Victor... Par une vraie disgrâce
pour M. Drumont, il a tourné au sérieux, au grave,
au terrible.
Les
premiers jours les Non, il n'est pas de race juive, l'ont
emporté sur les Oui. Au bout de trois semaines,
les Oui et les Non se balançaient: - 7237
Non contre 6973 Oui.
Mais
les votes motivés (200 environ) ont presque tous été
pour l'affirmative. Nous les avons tous affichés à
notre devanture, sauf, bien entendu, ceux qui étaient
contraires à la décence ou qui mettaient des femmes
en jeu. Nous les conservons à la disposition des curieux;
nous voulions même les publier. - quand une lettre trouvée
dans l'urne est venue considérablement modifier nos idées...
(Le lendemain du reste, le vingtième jour du vote, notre
boite aux lettres était éventrée dans la
nuit. Nous ne l'avons pas remplacée).
Voici
textuellement la lettre en question; nous n'en supprimons que
les noms propres:
Monsieur,
Permettez-mois
de vous mettre sous les yeux quelques renseignements qui vous
prouveront que Drumont est un simple drôle.
Et
d'abord, pour être édifié sur son ancien
rôle de Mouchard, tâchez de vous procurer
le premier numéro du Diable à quatre. C'est
une petite publication, du format de la Lanterne de Rochefort,
qui a succédé à celle-ci après sa
suppression et qui était rédigée par Villemessant,
Alphonse Duchesne, Édouard Lockroy et Méphistophélès.
Ce premier numéro est du 17 octobre 1868. J'en ai un
exemplaire sous les yeux. Si vous êtes trop jeune pour
vous le rappeler, les contemporains de cette époque vous
apprendront qu'il paraissait à cette époque une
feuille ignoble, l'Inflexible, publiée sous les
auspices de la police et destinée à diffamer,
flétrir, salir tout ce qui était de l'opposition,
notamment Rochefort...
Il
était rédigé par des mouchards de bas étage,
Stamir, Marchal dit de Bussy, etc., qui étaient l'objet
du dégoût général.
Drumont
soupçonné d'être affilié à
cette bande de diffamateurs s'en défendit. Alors, de
Villemessant lui mit le nez dans ses ordures. Il s'était
procuré les épreuves d'un numéro de l'Inflexible.
Elles étaient corrigées de la main de Drumont,
et le bon à tirer était signé de lui. De
Villemessant fit autographier dans ce numéro du Diable
à quatre le bon à tirer signé Drumont.
Vous devez en tous cas retrouver à la Bibliothèque
nationale le Diable à quatre du 17 octobre 1868.
Vous pouvez donc mettre hardiment en tête de votre nouvelle
brochure Drumont Mouchard.
Autre
infamie de Drumont. Lors des affaires du Panama, A..... mena
grand tapage du nommé X. qui figurait sur la liste des
chéquards: La Libre Parole s'étendit avec
complaisance sur la personnalité probable masquée
sous ce X..... Pendant des semaines on insista pour dire aux
lecteurs:
"Supposez
une haute personnalité, la plus haute que vous puissiez
imaginer." Bref, il était évident pour tout
le monde que l'insinuation disait Carnot.
Or,
y eut-il jamais plus abominable et plus lâche attaque?
Désigner ouvertement Carnot sans le nommer, de façon
aussi à pouvoir se dérober lorsqu'on serait mis
au pied du mur.
C'est
cette action basse que drumont conduisit dans son journal de
complicité avec l'ignoble A... Ce jeu dura des semaines;
puis lorsqu'on somma A... de dire si décidément
c'était Carnot qu'il avait en vue, il fut obligé
de déclarer que non. Mais le lâche coup était
porté! Combien de lecteurs avaient lu l'accusation par
insinuation et ne lurent pas la déclaration finale?
Peut-on
imaginer quelque chose de plus infâme?
Il
a été prouvé que le mouchard Drumont avait
des accointances avec la police impériale. Il lui en
reste une certaine tendresse pour ce régime cher à
sa jeunesse.
Je
vais vous révéler un complot impérialiste
dont il a été un des conspirateurs et des inspirateurs.
C'était
quelques temps avant la mort de Carnot. Un syndicat d'hommes
politiques et financiers se forma pour faire la restauration
impériale en faveur du prince Victor. L'un des membres
influents était le vicomte d'....., député.
On avait réuni 50 millions. On devait faire, pendant
les derniers mois de la Présidence de Carnot, une propagande
à outrance, mener grand tapage de camelots, de brochures,
etc..., fonder des journaux, en un mot allumer le suffrage universel.
On avait encore six mois devant soi pour cette campagne. On
commença par faire le fameux plébiscite de la
Libre Parole que vous vous rappelez; farce burlesque
à laquelle personne ne se laissa prendre du reste. Le
prince Victor était, bien entendu, sorti vainqueur de
cette urne biseautée. On allait continuer de ce pas lorsque
la mort inopinée de Carnot dérouta tous les plans
et amena la dissolution du syndicat. Si on avait réussi,
il est bien entendu que les financiers qui avaient fait l'avance
de fonds s'étaient réservé toutes les affaires,
tous les monopoles, toutes les grandes entreprises de l'Empire.
C'était de simples spéculateurs a qui on avait
livré toutes les richesses de la France.
Mais
que dites-vous de ce grand tombeur de la ploutocratie qui s'était
affilié à une bande de ploutocrates pour livrer
la France à Victor et la caisse à ses aigrefins?
Et lui, qu'elle part s'était-il réservé
là-dedans? Soyez certain qu'on verra réapparaître
un de ces jours la réclame en faveur de Victor.
Du
reste, la fuite en Belgique n'avait pas d'autre objet que de
rapprocher le conspirateur et le prétendant pour s'entendre...
etc., etc.
Un
ancien fonctionnaire du Ministère de l'intérieur.
A
la lecture de cette lettre, il ne pouvait plus y avoir de question
juive en jeu. Bien avant Drumont, nous avons dénoncé
les malversations du Panama et combattu les tripoteurs - juifs
ou non - des mines d'or; et nous l'avons fait, nous, en dépensant
notre argent personnel, sans autre intérêt que
celui que nous inspirait l'épargne française,
saccagée et filoutée par des cosmopolites de toutes
religions.
Mais
qu'importe tout cela aujourd'hui? La question est désormais
posée autrement haut.
Comment!
L'homme qui se réclame si bruyamment du nom de Français
et qui s'attribue le monopole de la vieille patrie et du sol
national, ne serait qu'un misérable, qu'un gredin au-dessous
de tout ce qu'il y a de plus bas?
Nous
ne voulions pas y croire. Eh quoi! M. Édouard Drumont,
l'insulteur de tout le monde sans exception: des juifs, des
évêques et du pape lui-même; le calomniateur
de Carnot, l'insulteur (du reste prudent) de Casimir-Périer,
le diffamateur de Félix Faure, qui aboie après
tous les ministères, radicaux ou modérés,
uniquement parce que, quels qu'ils soient, ils conservent la
République; cette hyène féroce, cet emprunteur
d'argent chez Cornélius Hertz, etc., etc., etc., oserait
tant d'infamies sans être lui-même à peu
près pur, à peu près décent dans
son passé?...
Cela
nous paraissait impossible!
S'il
avait été rédacteur de l'Inflexible,
est-ce que les hommes que cette feuille ignoble couvrait de
boue, en 1868, auraient pu l'oublier et ne l'auraient pas arrêté
net?...
Est-ce
que monsieur Édouard Lockroy, journaliste distingué
et ministre de la marine, n'aurait pas relevé les abominables
articles de Drumont contre lui, l'hiver dernier notamment?
Est-ce
que Mme Séverine se serait, pendant de longs mois, liée
d'amitié avec le rédacteur d'un journal où
Jules Vallès était traîné dans la
fange?
Est-ce
que Henri Rochefort, l'homme qui avec Jules Vallès fut
le plus diffamé par l'Inflexible, aurait toujours
conservé vis-à-vis du seul survivant de cette
ordure une attitude plutôt courtoise.
Il
parle cependant des rédacteurs de l'Inflexible
dans le premier volume de ses Aventures de ma vie, avec
une véritable indignation et il rappelle comment il alla
souffleter leur imprimeur.
Est-ce
que le Figaro, enfin, puissant et justement lu par tout
le monde et dans tout l'univers, aurait pardonné et,
parfois même, fait de la réclame à son ancien
calomniateur?...
Non,
mille fois non, nous disions-nous. Cela n'est pas possible,
et notre correspondant doit se tromper.

Notre
correspondant ne se trompait pas.
Nous
nous mîmes en quête du Diable à quatre,
et quelques jours après nous étions en possession
de la collection complète. Voici l'article du 1er numéro
du Diable à quatre, signé Hippolyte de
Villemessant, le célèbre fondateur du Figaro.
Le
Diable à quatre (N°
1, 17 octobre 1868)
Pages
53 et suivantes.
M.
Veuillot, à force de répéter qu'il est
pieux, a fini certainement par le croire. Mais n'est-il pas
vrai qu'un journal assez heureux pour être dirigé
par un homme véritablement chrétien, serait le
plus indulgent, le plus charitable, le plus paternel en ses
remontrances, le plus ennemi de l'invective, le plus modeste
de tous les journaux et n'oublierait jamais ni les lois de la
saine morale ni les règles de la bonne compagnie?
Oui
mais dans ce cas, que deviendrait le violent polémiste
Louis Veuillot, ce Fréron de la presse dévote?
Qu'on
n'aille pas croire que je garde contre le rédacteur en
chef de l'Univers la moindre rancune. J'en aurais le
droit cependant, mais j'aime trop l'esprit pour tenir longtemps
rigueur à ceux qui en ont une si belle provision.
Que
M. Veuillot ne se lasse donc pas d'écrire dans ses mandements
que je suis un idiot, que je ne sais pas diriger un journal,
que mes rédacteurs me mènent par le bout du nez,
et autres gentillesses. Rien au monde ne me touche moins.
Les
seules représailles que je veuille exercé contre
mon insulteur ordinaire, c'est de lui rappeler certaine lettre
écrite d'un tout autre style. Je l'ai retrouvée
dans mes paperasses et j'en ai fait exécuter une autographie,
que mes lecteurs trouveront à la fin de la présente
livraison. Je suis heureux de leur offrir cet autographe de
l'homme qui, sans s'en douter, à le plus écrit,
ad majorem diaboli gloriam.
Cependant,
comme j'ai quelques réflexions à y joindre, je
donne ici ce document en caractères romains, les seuls
sans doute qui plaisent à l'auteur.
28
mars 1867
Est-ce
vrai, Monsieur, que vous méditez de prendre des
actions de l'Univers? Je vous assure que plusieurs
choses m'étonneraient davantage. Vous êtes
de ces incendiaires, très nombreux dans ces civilisations
décousues, qui ne veulent pas opérer trop
loin des pompiers. Ils accordent cette satisfaction
à leur conscience et ils mettent le feu, et ça
brûle. Devenez donc mon actionnaire, je pomperai
sur vous et vous serez mouillé; mais vous aurez
toujours le plaisir de voir flamber vos actions.
Ceci
entendu, hâtez-vous, s'il vous plaît. Le
moment approche de constituer la société
qui deviendra propriétaire du journal. Vous vous
trouverez là "en bonne compagnie".
Ce n'est pas une manière de parler.
Cette
sorte exquise de bonne compagnie ayant peu l'usage de
nos mécanismes, il me plairait fort de vous y
introduire, comme le contrôleur le plus expert
de toutes les dépenses auxquelles la mise en
train et l'exploitation d'un journal peuvent donner
lieu. Je ne serais pas fâché de vous montrer
comment nous faisons les choses, et votre présence
me soulagera un peu du déplaisir que j'ai d'avoir
à conduire une affaire en même temps qu'à
présider une rédaction.
M.
Jouvin vous-a-t-il parlé d'un jeune garçon
qui me prie de le recommander à vous? Il se sent,
hélas! après en avoir essayé, plus
fait pour votre bâtiment que pour le mien. Il
a quelque lecture, de la vivacité dans l'esprit,
de l'élégance dans la main; il a aussi
fort grand appétit, par des raisons trop légitimes.
Mais pourrais satisfaire sont appétit qu'il ne
me resterait pas. Pour me rester il faut une âme
de héros; ce n'est pas encore son fait. Il est
oiseau et c'est chez vous que l'on gazouille.
Puisqu'il
me quitte, prenez le. Il en vaut d'autres, et je l'aime
mieux chez vous qu'ailleurs. Les écarts ne manquent
pas, mais pourtant on y va moins de travers. Pauvre
petit!
Vous
devriez ne le faire servir que sous le masque jusqu'à
l'âge de raison du gendelettre, vers quarante
ans.
Je
suis, Monsieur l'actionnaire, votre très humble
et obligé serviteur.
Louis
Veuillot
|
Cette
lettre spirituelle, élégamment écrite et
dont chaque mot porte, M. Veuillot me l'adressait au moment
ou se constituait la nouvelle société de l'Univers.
On voit qu'à cette époque il pensait quelque bien
de moi, dont il dit tant de mal aujourd'hui. Aussi, quoi que
je ne me sois jamais intéressé dans aucune entreprise,
et que je n'ai pas même pris d'emprunt mexicain, je souscrivis
sans enthousiasme, mais par déférence, une action
de l'Univers. Je dois déclarer toute fois que
M. Louis Veuillot n'a jamais fait toucher à ma caisse
la somme que j'avais souscrite. Il m'écrivit même
quelques mots après pour me dégager courtoisement
de ma promesse, alléguant qu'il craignait que, son journal
pouvant avoir à soutenir d'un jour à l'autre une
polémique contre le mien, il valait mieux que nous ne
confondissions pas nos intérêts.
Quant
au "jeune garçon de grand appétit" que
me recommandait si chaleureusement M. Veuillot, voici son histoire:
elle est édifiante.
Quoique
ce débutant élevé à l'école
de l'Univers, n'eût ni le talent, ni même
la connaissance du métier qu'on a le droit d'exiger d'une
recrue, je l'engageai dans mes troupes légères
pour être agréable à son ancien patron.
Il
signa chez moi quelques chroniques sans saveur quoique prétentieuses,
que je lui payais aussi cher qu'au meilleur de mes rédacteurs;
après quoi je le laissais volontiers voler à d'autres
conquêtes.
Je
ne savais ce qu'il était devenu, quand on me dit qu'il
était attaché comme secrétaire de la rédaction
au journal des sieurs Bussy et Stamir. Mon collaborateur Albert
Wolff fit, dans une de ses chroniques, d'ironiques compliments
à M. Veuillot du progrès rapide de son élève
dans la carrière de l'éreintement. Aussitôt
M. Drumont - tel est le nom du protégé de l'Univers
- nous écrivit pour protester avec une indignation
bien sentie contre une accusation aussi déshonorante.
Nous lui donnâmes acte de sa lettre, sans l'insérer.
Il l'envoya au Gaulois, qui fut heureux de la publier.
M.
Drumont opposait à notre insinuation "le plus formel
démenti. Il n'avait jamais été mêlé
en quoi que ce soit à la rédaction de ce papier."
Comme
pièce justificative, il produisait en même temps
une déclaration signée du sieur Charles Marchal,
lequel attestait que le jeune Drumont n'avais jamais "apporté
un concours quelconque à l'Inflexible et qu'il
était resté absolument étranger, directement
ou indirectement à cette publication".
Le
sieur Stamir, de son côté, délivrait à
M. Drumont un certificat identique. Ah! Les bons billets qu'avait
La Châtre!
Eh
bien! La vérité de tout cela, c'est que M. Drumont
était bel et bien affilié à la bande des
diffamateurs, qu'il se vautrait dans cette boue infecte et exerçait
dans le journal que vous savez des fonctions régulières.
En
veut-on une preuve incontestable?
Mon
confrère Albert Wolff ayant fait remise pleine et entière
à l'imprimeur Fischlin de l'amende de 10.000 francs à
laquelle il avait été condamné pour avoir
prêté ses presses aux sieurs Stamir et Marchal,
ce père de famille, dans l'effusion de sa reconnaissance,
a livré à Wolff les épreuves d'un numéro
de l'Inflexible entièrement corrigé de
la main de M. Édouard Drumont. Et pour que celui-ci,
à qui les dénégations coûtent peu,
ne soit pas tenté de crier encore à la calomnie,
je lui mets sous les yeux l'autographe très fidèle
du bon à tirer donné par lui et orné
de ses initiales.
|
Et
qu'il ne vienne pas dire que cet E et ce D ne lui appartiennent
pas: nous avons en main une lettre de l'imprimeur belge,
qui dévoile son incognito.
Quelle
est là-dessus l'opinion de M. Veuillot?
|
En
me recommandant M. drumont: "il est oiseau, m'écrivait-il,
et c'est chez vous que l'on gazouille!" oiseau! oui, car
c'est un joli merle qui, au lieu de siffler croasse comme un
grenouille dans les plus fétides marais.
Du
reste, la conduite de son protégé ne doit pas
révolter M. Veuillot; car, après tout, le jeune
homme a conservé au moins une qualité, la reconnaissance:
il fait à son protecteur la politesse de reproduire les
articles de l'Univers où était injuriée
la rédaction du Figaro. Dans presque tous les
numéros se trouvait quelque diatribe signée de
M. Veuillot.
De
manière que ces messieurs, au lieu d'être trois,
comme on le croyait, étaient quatre.
L'Inflexible,
devenu la succursale de l'Univers, n'est-ce pas là
une étonnante odeur de Paris?
H.
DE VILLEMESSANT.

A
la lecture d'une aussi écrasante exécution, nous
nous sommes demandé si nous ne rêvions pas. Pour
bien se rendre compte, en effet, de l'énormité
de la marque au fer rouge imprimée au front de celui
que flétrissait ainsi M. de Villemessant, il ne suffit
pas de voir les journaux de l'époque jugeant l'Inflexible
et ses rédacteurs, il faut avoir lu soi-même cette
abominable publication, pour comprendre combien le seul fait
d'y avoir participé est une tare éternelle et
que rien ne saurait effacer.
Nous
avons pu nous procurer cette collection, à peu près
introuvable aujourd'hui, et le plus profond dégoût
nous a soulevé le cur. Vraiment, pour si déloyal
et menteur que l'on connaisse M. Drumont, nous avons d'abord
conçu quelques doutes, quelque espérance même
de voir dans les numéros suivants du Diable à
quatre soit un démenti de lui, soit une justification
quelconque. Nous n'avons rien trouvé. Partout et toujours
le silence autour de cette exécution.
Il
y a quelques fois des trouvailles inespérées,
peut-être providentielles, pour les hommes de bonne
volonté..... En même temps que les numéros
de l'Inflexible, nous avons trouvé l'épreuve
d'une sorte de préface, d'entrée en matière
de cette publication repoussante. Cela est intitulé:
AVANT-GARDE
DE
L'INFLEXIBLE
La
vérité sur mon duel. - JULES VALLES-VICTOR NOIR
par
Alexandre de Stamir.
Nous
nous garderons bien de résumer ces quatre pages et même
d'en donner un seul extrait, il nous suffira de dire que l'Inflexible,
qui fut, en définitive, mis en vente à 25 centimes,
y était annoncé à DIX FRANCS l'exemplaire.
On ne devait en tirer que cent.
Ce
n'est pas seulement un exemplaire de l'Avant-Garde de l'Inflexible
que nous avons entre les mains; c'est bel et bien son épreuve
authentique, avec les corrections manuscrites, les des diffamés
écrits, ajoutés à la main.
Si le Figaro et M. Henri Rochefort y tiennent, nous mettrons
volontiers cet épreuve sous leurs yeux; peut-être
reconnaitrons-t-ils, eux, la main du correcteur de cette épreuve,
unique au monde.
Cette
épreuve, parait-il, provient de la succession d'un agent
de police de l'Empire, tué sous la Commune.
Certaines
personnes ne doivent cependant pas ignorer ce que nous ne savons,
nous, que d'hier. Comment ont-elles pu attendre pour que le
passé du Bottin de la Diffamation fût enfin
ressuscité, l'intervention et la rentrée dans
son pays natal d'un citoyen obscur comme nous?
Est-ce
que cette ignoble affaire ne doit pas être mise au grand
jour?
Nous
en appelons à M. Henri Rochefort;
Aux
héritiers, ou ou représentants fidèles
de Jules Vallès;
Aux
diffamés survivants (que nous n'avons pas à nommer)
du journal de Marchal - de Bussy, de Stamir et d'Édouard
drumont;
Au
Figaro, qui, dans sa magnifique prospérité,
n'a jamais oublié le nom de son fondateur et en perpétue
justement le souvenir en tête de ses colonnes.
Nous
en appelons enfin au public!
JOSEPH
ARON
_______________
Nos
remerciements bien sincères à Monsieur le Grand
Rabbin de France qui nous a fait l'honneur de nous faire demander
par M. Arthur Kahn quelques centaines de nos brochures, à
M. le professeur Becker du Lycée Charlemagne envoyé
par M. le Grand Rabbin, à MM. Leven et Klein, membres
du consistoire pour leur chaleureuses lettres, à MM.
Bernard Lazard, Prague, Wormser et autres, qui nous ont fait
l'honneur de nous féliciter verbalement. Dans notre prochaine
édition nous publierons toutes les lettres reçues.
J.
A.