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Le
parcours de Joseph Aron
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Lazard
Aron et Françoise Picard, les parents de Joseph Aron. |
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Le
15 décembre 1836, Lazare et Françoise Aron donnent naissance à
leur premier enfant, Joseph. La famille Aron, Phalsbourgeoise
depuis la fin du XVIIème siècle, prospère dans le commerce, et
à priori, rien ne semble destiner le jeune Joseph bercé par les
cultures juive et surtout lorraine (Chatrian fut son professeur)
à émigrer pour le « nouveau Monde ».
Pourtant
plusieurs membres de la famille ont déjà traversé l’Atlantique,
et ont convaincu leurs jeunes cousins des opportunités de réussite
qu’offrait l’Amérique. Le premier d’entre eux est son cousin germain,
Alexandre Lazard, qui partira pour la Nouvelle Orléans alors que
Joseph n‘est encore qu‘un nourrisson. Plus tard rejoint par deux
de ses frères Lazare et Simon, ils quitteront la Louisiane en
1848 pour s’installer à San Francisco où il vont créer Lazard
Frères, qui deviendra plus tard la fameuse banque Lazard.
En
1855, à 19 ans, Joseph part pour San Francisco, un an après son
autre cousin germain: Alexandre Weill. Il y débute comme employé,
puis, assez rapidement s’associe avec Julius Beer dans la société
d’importation et de commerce de tabac Weil & Co. .
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C’est
l’époque de la « ruée vers Or » et son activité est prospère.
Comme pour ses cousins Lazard, Weill et Cahn, la situation de
Joseph Aron s’établit, et il devient un notable de la jeune ville
de San Francisco, qui compte déjà près de 60.000 habitants en
1860.
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En
1864, deux ans après la mort de son père, il rentre en France
pour se marier avec Adélaïde Cahn, sa cousine germaine, dont la
sœur Julie épouse son cousin Alexandre Weill. Ensemble ils auront
deux enfants, Lucie et Lucien (qui décédera à l’âge
de 4 ans).
A San Francisco il est très actif, et outre son activité de négoce
de tabac, il s’investit dans diverses associations. En particulier
la Eureka Benevolent Society, l’une des plus anciennes associations
juives de bienfaisance des États-Unis qui existe encore
de nos jours sous le nom de San Francisco Jewish Family and Children's
Services, et dont il sera longtemps le codirecteur.
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Au
printemps 1867, il rencontre Adolphe Sutro qui ayant possédé
un magasin de tabac de détail, avait été en affaire avec
Weil & Co., avant que Joseph Aron y soit associé.
Joseph Aron
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Lucien et Lucie Aron, les enfants de son premier mariage. |
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Cette
rencontre sera un tournant dans sa vie, car elle va l’entraîner
dans une aventure qui le marquera profondément. Adolph Sutro a
le projet de faire un tunnel de drainage pour des mines près de
Virginia City dans le Nevada. Impressionné par cette ambitieuses
entreprise, il sera le seul à ne pas tourner le dos à Adolph Sutro
lorsque ce dernier cherchera de l’aide.
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Quelques
mois plus tard, après lui avoir offert 1.000 dollars pour une
action de la future société, il ira jusqu’à lui offrir 3.000 dollars
pour qu’il puisse aller en Europe chercher des investisseurs,
et versera pendant son absence 200 dollars par mois à sa famille
pour ses dépenses courantes. Lorsque’après de nombreuses difficultés
la société Sutro Tunnel voit le jour, Joseph Aron en sera le Président
(sans salaire) jusqu’en 1873.
Alors
que sa famille et son associé voient d’un œil critique son engagement
dans la Sutro Tunnel Company, il s’investit sans retenue dans
ce projet. Sa déception sera à la hauteur de cet investissement
lorsque’en 1879, il apprend qu’Adolphe Sutro a vendu en secret
les actions qu’ils s’était attribuées à la Union Trust Company,
flouant du même coup l’ensembles des actionnaires qui lui avaient
fait confiance. Adolph Sutro fera fortune en réinvestissant l’argent
ainsi obtenu dans d’immenses terrains alors sans valeur à San
Francisco dont deviendra le maire.
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En
1874, alors que le premier « cable car » ne fonctionne que depuis
quelques mois Joseph Aron et sa famille, après un voyage en France
migrent pour New-York. Il s’y occupera de Weill & Co., mais y
sera également le premier fondé de pouvoir de la Banque Lazard.
Devenu
un notable new-yorkais, et citoyen américain depuis 1871, il sera
nommé en 1885, à la mort du Général Grant, dans le comité d’une
centaine de personnalités new-yorkaises constitué par le maire
pour réunir des fonds destinés à élever un monument à la mémoire
de l’ancien Président, héros de la guerre de Sécession.
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L'une
des entrées du Sutro Tunnel
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Choqué
en tant que français,et lorrain, par les félicitations qu’avait
adressé Grant à l’Allemagne victorieuse de la guerre de 70, Joseph
Aron refuse cet « honneur ». Ce refus lui vaudra de violentes
critiques de la part de la communauté allemande de New-York et
l’incompréhension de ses amis américains. Pour s’en expliquer,
il publiera un livre simultanément à Paris et à New-York, « Deux
Républiques Sœurs, France - États-Unis » qui sera le premier
d’une longue série, et le début de sa propension à la polémique.
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Rosalie
Mace la seconde épouse de Joseph Aron
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En
1886, il se retire des affaires et rentre en France pour vivre
à Paris. Il a alors 50 ans. Il consacrera dés lors tout son temps
et son argent à défendre les causes qui lui semblent justes.
Il
va d’abord financer le procès que l’un des actionnaires de la
Sutro Tunnel Company veut intenter à la Union Trust Company. Là
encore il sera déçu de l’attitude de ceux qu’il aura soutenu et
n’hésitera pas à publier ses états d’âmes étayés des faits.
En
octobre 1892, alors qu’éclate le scandale du canal de Panama,
son épouse, Adélaïde Cahn décède à Saint-Germain-en-Laye.
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S’étant
découvert une vocation de publiciste, il va enchaîner la publication
de pamphlets et éditer un temps une revue intitulée « l’Or et
l’Argent ». Il va même pour pouvoir faire connaître ses idées,
louer une boutique rue de Condorcet à Paris où il affichera en
vitrine ses périodiques, ainsi que le courrier qu’il reçoit et
les réponses qu’il y donne.
C’est
à cette période qu’il rencontre une jeune bretonne, Rosalie Mace.
Tout les oppose: elle à 33 ans de moins que lui, il est juif et
elle est catholique, mais qu’importe… Alors que la France est
encore sous le choc de l’Affaire Dreyfus ils auront un enfant,
Mathilde qui verra le jour le 23 juillet 1896, quelques jours
après que Bernard Lazare, le célèbre avocat de Dreyfus, soit venu
le voir pour lui présenter sa brochure « contre l’antisémitisme,
histoire d’une polémique ».
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Joseph
Aron et sa famille dans leur maison de la rue Boileau à
Montrouge
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En
ces temps troublés, marqués par la montée de l’antisémitisme,
Joseph Aron va s’employer à combattre par ses écrits ce mouvement
incarné par Édouard Drumont. Paradoxalement, mais en harmonie
avec sa totale indépendance d’esprit il ne se ralliera pas aveuglément
à l’action les juifs puissants de l’époque, dont pourtant il faisait
partie. A Bernard Lazare il reprochera d’avoir choisi Zola dont
il considère certains passages comme antisémites, en particulier
dans « l’Argent». Il refusera également de prendre la tête d’une
publication juive financée par ces mêmes juifs puissants à la
tête desquels se trouve le baron de Rothschild, et auxquels il
reproche de ne pas se sentir concernés par les attaques dont font
l’objet leur coreligionnaires.
En
1898 il publie dans « Drumont, Zola et les Juifs » une lettre
ouverte à Bernard Lazare dans laquelle il fait la prophétie tristement
vérifiée depuis: « …le jour viendra où les juifs pauvres, aussi
intéressants que les chrétiens pauvres, seront peut-être massacrés
en bloc parce que les juifs riches, désormais à l’abri comme les
autres riches, n’auront pas voulu les défendre contre les carnassiers
et agitateurs de profession. ».
Décidément
fâché avec les convenances de l’époque, ce n’est qu’un an après
la naissance de sa fille qu’il épousera, à soixante et un ans
la jeune Rosalie, à qui il fera trois autres enfants, Simon, Lazare
et Sara qui seront tous élevés dans la foi catholique; ce qui
lui vaudra au passage de se brouiller avec la plus grande partie
de sa famille.
Il
continuera de publier ses diverses polémiques jusqu’à sa mort
à Paris le 31 octobre 1905.
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Si
vous possédez quelque information ou document que ce soit
concernant Joseph Aron, ou bien l'un des sujets qui lui ont été
chers, merci de me contacter par e-mail --->
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